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derrière la porte
2 mars 2008

rêverie, avec Oumou en fond sonore

tissus_africain

presque un rêve, presque une histoire mi endormie, mi reveillée.


Image : pagne africain KUBA : les hommes tisses, les femmes brodent.

Sont convoqués ceux de ma famille.
Ma vieille famille, avec le mouton dont la laine sera tissé.
Tous réunis autour des tables sombres dans une salle sombre. Avec un mouton au milieu.

Conseil de famille. Il fait chaud. Ici chacun est rentré en laissant derrière lui son titre d'oncle, de père, de soeur, de mère, de fils...
Chacun amène de la paille, du raphia.

Hommes et femmes sont assis, j'en suis le centre symbolique. Je les connais tous, et tous n'ont pas de visage. Ou plutôt un visage aux traits mouvants et insaisissants.

Le grand oncle, le plus vieux, le survivant, le tisseur de tissus, ouvre la séance. Il se lève, va au milieu du métier à tisser qu'il a réinventé, s'installe, prêt à fabriquer l'etoffe.

Chacun va prendre en silence un morceau de laine sur le dos du mouton, en silence.
Puis chancun leur tour, ils s'approcheront du doyen. Chacun, à coté du doyen, filera la laine en parlant : le doyen reçevait la parole, puis le fil. Cela a duré des heures. Des heures hypnotiques où je voyais des lèvres bouger, raconter l'histoire de la famille. Ils devaient raconter l'inceste.L'ont-ils fait ?
Je ne le saurais jamais.

En silence, chaque fil que le doyent reçoit il le tisse. En transe et en écoute, il tisse les mots de ma famille. Il les assemble. Pour m'en faire un pagne. Le pagne se met autour des reins pour cacher les fesses et le sexe. Il sert aussi à porter les bébés.

Tout est silence. Pas de bruit, pas de mots, rien. Juste de fortes odeurs de laine, de cendre, d'animal. Et les odeurs de ma famille.

Ca dure longtemps, si longtemps... Personne ne parle, je ne sais même pas si c'est pour me donner raison et me protéger, si c'est pour me dénigrer, si c'est pour m'enterrer...

Dans le silence la pièce de tissus est terminée.
Je ne sais que faire, personne ne m dit ou ne me montre comment me tenir.
Je vois le tissus, il est brun/blanc.

On me désigne alors le mouton nu. Il va être tué puis mangé par les participants.
Pour la première fois je ressens une forte emotion.

Manger de ce mouton grâce auquel on m'a fait un pagne me dégoute.

Il fait chaud, la nuit est là, les participants s'en vont, tout le monde s'en fout.
Je reste seule devant le métier à tisser vide, devand le pagne trainant par terre, pour lequel personne n'a de respect, regardant ce mouton nu et fragile, incapable de se défendre, incapable de savoir d'où viendra l'agression.

Je prends un long couteau, je lui ouvre le ventre avec. Je peux glisser mes mains dans ses tripes chaudes et douces et -enfin- me sentir mieux. En sécurité.

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